85 % des associations n’ont pas de salariés. Le Diaconat a fait le choix de recruter des professionnels en 2021. Son évolution ces trois dernières années aurait-elle été la même sans l’engagement de salariés compétents ? Il est temps de faire le point sur cette question.
Le Diaconat avait déjà eu un salarié à temps partiel pendant six ans au poste de secrétaire général, mais la situation financière ne permettait pas de maintenir ce poste. À la suite de l’obtention d’un legs important en 2019 et de l’appel à projet « France RELANCE », le Comité du Diaconat a longuement réfléchi aux actions possibles et a décidé de recruter des professionnels de l’action sociale pour lancer de nouveaux projets
Quatre recrutements
En mai 2021, Nathalie Carlin est recrutée comme responsable chargée de développement pour mettre en œuvre le projet « Accompagnement et accès à l’autonomie des publics précaires aidés par le Diaconat », décidé en 2020. Elle est secondée en mai 2022 par Nathan Palanque, travailleur social chargé de mission opérationnel.
Parallèlement, en novembre 2021, le Diaconat recrute Simla Ramphul, chargée de mission EN-ACT, sur un poste entièrement financé par la FEP (Fédération de l’Entraide protestante).
Ces trois salariés, initialement en CDD, voient leur contrat transformé en CDI en 2023.
Enfin, pour assurer les ateliers d’initiation au français langue étrangère (FLE) à l’Échoppe, Wenxin Li, dite Laure, arrive en octobre 2022 comme stagiaire de FLE, puis sur contrat à durée déterminée jusqu’à juin 2024.
Des professionnels du travail social
Fort de l’engagement de plus de 50 bénévoles, sans compter la trentaine de familles du réseau Esaïe, le Diaconat menait de front ses cinq pôles d’activité avec entrain et générosité, mais dans les limites de ses ressources humaines quelque peu vieillissantes et de ses compétences.
L’arrivée de professionnels a permis d’aller bien au-delà de l’aide matérielle apportée aux personnes accueillies.
Nathalie a pu restructurer l’accueil social en formant les bénévoles.
Dès son arrivée, Nathan s’est impliqué dans l’étude des dossiers avec les bénévoles et dans l’accompagnement individuel pour l’accès aux droits.
Ils ont ensemble élargi le réseau des partenaires et ont pu améliorer l’orientation des personnes vers les structures les plus adaptées.
Grâce à leur travail, plusieurs personnes accueillies à l’Échoppe ont pu sortir du dispositif d’aide.
Une évolution qui a bénéficié à l’Échoppe, à l’Escale et à l’Entraide, comme le souligne Ariane, membre du Comité :
« Les compétences professionnelles des travailleurs sociaux salariés sont précieuses dans le traitement des dossiers de demande d’aide financière et facilitent les relations avec les autres travailleurs sociaux du département. »
Des activités nouvelles
En juin 2022, un projet dont les bénévoles rêvaient voit enfin le jour.
Faire cuisiner ensemble des personnes accueillies à l’Échoppe, accompagnées par un salarié, une bénévole et une diététicienne, en échangeant des recettes des pays d’origine et de France et en parlant français entre elles.
Douze ateliers ont eu lieu en 2023, touchant au total 76 participants, soit 40 adhérents différents.
Ces ateliers de cuisine « La santé dans l’assiette » sont vite complétés par des sorties de cueillette et de glanage, rendues possible par l’acquisition d’un véhicule transportant les adhérents et le produit de la cueillette, conduit par Nathan.
De nombreux ateliers s’ajoutent ensuite : « Les bons plans de l’Échoppe », bon plan énergie, bon plan budget, bien-être et cosmétiques, jusqu’aux ateliers de français et de conversation menés par Laure.
Un moyen de faire sortir les adhérents de leur quartier, tout comme les excursions organisées à l’Escale par Nathalie et poursuivies par les bénévoles.
Une démarche participative
Développer le « pouvoir d’agir » des adhérents en les rendant acteurs du changement… Ne plus faire pour eux, mais faire avec eux. Construire ensemble des réponses aux besoins exprimés : un accès à une alimentation saine et diversifiée, un accès aux droits, et la reconnaissance de leurs compétences et expériences de vie.
Nathalie et Nathan ont lancé cette dynamique qui a renforcé les liens entre salariés, personnes accueillies et bénévoles, et entre personnes accueillies elles-mêmes car elles apprennent à se connaitre et à s’apprécier durant les ateliers et les réunions.
Un projet d’envergure politique
Lancé en 2021, le projet EN-ACT est une action d’accompagnement de la régularisation par le travail des exilé.e.s sans papier.
Salariée du Diaconat, financée par la FEP, Simla est chargée de sa mise en œuvre auprès des services de la Préfecture, en partenariat avec plusieurs associations du collectif Migrants en Isère, avec le monde économique, employeurs et syndicats.
On sait combien le travail peut être un catalyseur d’intégration, non seulement en apportant l’autonomie financière mais aussi en favorisant l’apprentissage du français et des codes culturels.
Un projet essentiel donc, malheureusement soumis aux aléas des politiques en matière d’immigration.
Transversalité et partenariats
Travaillant quasiment à plein temps sur les projets, les professionnels ont acquis une connaissance transversale des actions du Diaconat que n’ont pas les bénévoles, souvent engagés dans une seule activité.
Des passerelles et des liens entre les activités se créent : l’Échoppe vient au secours de personnes de l’Escale et réciproquement ; des jeunes d’Esaïe viennent aider à l’Échoppe ; l’Entraide finit par aider les uns ou les autres…
De plus, par leur connaissance des structures institutionnelles et associatives et leur présence sur le terrain, les professionnels élargissent les partenariats du Diaconat, facilitant des actions communes dans la cité.
Des recettes en plus
Certes, les ressources humaines ont un cout, en salaires, charges et travail de gestion. Mais les salariés prennent le temps de répondre à des appels à projets et de chercher des subventions et du mécénat qui augmentent les recettes du Diaconat. Résultat : on peut pérenniser l’emploi et voir plus loin.
Un pari réussi
Des bénévoles se montraient réticents par rapport au salariat, se demandant comment les salariés s’intégreraient parmi eux et si l’association pourrait en supporter le cout.
Il a bien sûr fallu changer quelques habitudes pour trouver un équilibre des rôles et des responsabilités. Par chance aussi, les personnes recrutées se sont particulièrement bien adaptées au contexte.
Aujourd’hui le constat est sans équivoque : compétences professionnelles et efficacité, organisation et planning, disponibilité permettant l’ouverture en été par exemple, transversalité et, pour couronner le tout, des qualités humaines qui consolident et réchauffent toute la communauté du Diaconat.
Élisabeth Olléon, Bureau du Diaconat